Le costume dans la France napoléonienne

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Aux excentricités du Directoire, Napoléon tente d’opposer l’ordre et l’élégance, tandis qu’apparaissent aussi des tendances romantiques et bourgeoises

Après le coup d’état de Brumaire (9-10 novembre 1799), Bonaparte obtient le consulat à vie en 1802 et établit l’Empire en 1804. Avec la défaite de Trafalgar en 1805, il ne peut plus lutter contre sa grande rivale anglaise que par un blocus économique, mais il se rend maître de la moitié de l’Europe. Sa fortune s’inverse cependant et il doit abdiquer en 1814. La monarchie est rétablie avec Louis XVIII mais, en mars 1815, Napoléon reprend le pouvoir pour « cent jours ». Battu à Waterloo en juin, il abdique une seconde fois et est exilé à Sainte-Hélène, où il meurt en 1821.

Napoléon combat les excentricités vestimentaires du Directoire, auxquelles il oppose l’ordre, l’équilibre et la distinction. Cependant il ne peut juguler les tendances qui aboutiront au romantisme ou au triomphe de valeurs bourgeoises. Il tâche d’initier à la vie mondaine ceux qui, grâce à la Révolution, ont accédé à un rang auquel ils n’étaient pas préparés. Joséphine, issue de l’ancienne noblesse, joue le rôle de conciliatrice entre ces deux mondes. Ayant toujours fait montre d’un goût pour le luxe, elle donne à la mode une allure gracieuse et légèrement nonchalante, qui disparaîtra avec Marie-Louise d’Autriche, adepte de l’étiquette. L’écart s’accentue entre costume de cour et de ville. Celui-ci évolue vers une austérité bourgeoise, avec des lainages sombres pour les hommes. La toilette des femmes se doit de refléter la fortune accumulée ; c’est donc la transformation de la silhouette féminine qui montrera désormais l’évolution de la mode.

Les fastes de la cour

La cour vit des fêtes et cérémonies fastueuses ; l’industrie du luxe connaît un nouvel essor. Le grand habit de Napoléon comporte une culotte et des bas de soie blanche, des souliers blancs brodés d’or, une tunique de soie blanche brodée et ornée en bas de crépines (sphères métalliques percées de trous) d’or. Son manteau est en velours pourpre semé d’abeilles d’or, brodé à l’entour et doublé d’hermine. Des gants blancs brodés d’or, une cravate en dentelle et une couronne d’or en feuilles de laurier complètent l’ensemble. Une épée à poignée d’or enrichie de diamants est attachée à une écharpe blanche portée en ceinture et ornée de crépines. Vous trouverez plus de ressources sur ce site.

Le grand habit de Joséphine est constitué d’une robe de soie blanche brodée, ornée de crépines et garnie ou non en haut de dentelle relevée ; d’une ceinture blanche brodée d’or ; d’un manteau à longue queue attaché sur les épaules, de même couleur et broderies que le manteau de l’Empereur ; d’un diadème en or et pierreries.

Le costume féminin sous le Consulat et l’Empire

De 1799 à 1804, les lignes, bien qu’assagies, sont encore celles du Directoire. Les jupes perdent leur transparence et leurs fentes latérales. Elles restent souples, très longues, et jusqu’en 1806 elles sont souvent pourvues d’une petite traîne, ensuite réservée aux tenues parées. Les courts corsages s’ouvrent devant et se froncent « en rideau », autour des seins, tandis que le décolleté devient un carré arrondi aux angles. Les corsets reviennent, d’abord sous la forme d’une sorte de soutien-gorge, avec un dispositif pour écarter les seins appelé « divorces », puis sous celle d’un corset plus classique « à la Ninon ».

Les manches sont plates, cylindriques et courtes, complétées par de longs gants, ou ajustées et se prolongeant en mitaines. De 1804 à 1811, la robe est fermée dans le dos, et perd les fronces de son corsage, qui moule plus étroitement la poitrine. Le décolleté prend des lignes plus nettes. Presque toujours rectangulaire, il peut se terminer en pointe ou dessiner une sorte de cœur. Les manches sont courtes et ballonnées ou longues et ajustées, parfois surmontées d’un petit mancheron froncé.

On peut enfiler sur la robe une tunique plus courte, un corset (petit corsage sans manches d’un ton différent de la toilette) ou un canezou (corsage de mousseline s’arrêtant à la taille). Mais le spencer, courte veste à manches longues, col et revers, reste un favori, ainsi que les grands châles et longues écharpes du Cachemire, ramenées d’Egypte.

Avec un goût persistant pour l’antique, les cheveux sont rassemblés derrière la tête en un chignon oblong d’où partent des rubans disposés en diadème sur le front. Les postiches demeurent courants. On porte des bonnets, cornettes, toques, turbans ou capotes ; le jokei, à visière d’où tombe un voile, connaît un grand succès.

Les souliers sont décolletés, étroits et pointus, en fine peau ou en étoffe, généralement noire. Les semelles sont d’une minceur extrême.

Le costume féminin après la chute de l’Empire

La chute de l’Empire est ignorée par la mode, seuls les détails montrant une évolution vers le romantisme. Des ornements variés alourdissent le bas de la jupe, raccourcie au-dessus des chevilles. Le corsage est en trapèze, en ovale ou en pointe très évasée et souvent orné d’un biais de satin évoquant une pièce d’estomac. Vers 1816, il est montant et peut comporter un ornement à l’emplacement d’un décolleté bateau. Les manches longues sont serrées par un cordon au-dessous du poignet. Celles « à la mameluck », à ballons créés par des bracelets froncés, retrouvent un regain de faveur, après un premier succès sous le Consulat. A partir de 1815, les épaules s’ornent de bourrelets et de bavolets. Dans la journée, les décolletés sont voilés d’une guimpe. En été, les robes sont claires, agrémentées de broderies et cordelières rouges ; l’hiver, elles sont en cachemire, ottoman ou crêpe de soie colorés. On porte aussi, pour l’été, des écharpes de couleur croisées sur le buste et nouées dans le dos.

Le spencer, complètement fermé et à ruchés, et la redingote, devenue un peu plus courte que la robe, ont toujours du succès. A l’époque de la campagne de Russie, on adopte la witzchoura, longue redingote fourrée, à large col étalé sur les épaules ou à coqueluchon.

La coiffure connaît de grands changements. Les cheveux sont relevés par un peigne, formant au sommet du crâne un chignon de boucles, une natte en couronne ou de petites coques. Pour sortir, on porte une haute capote (« à la pamela »), à calotte cylindrique, dont la large passe plaquée sur les joues encadre les bouclettes du front et des tempes. A partir de 1816, on voit aussi des chapeaux proches du haut-de-forme et des toques à plumes.

Les souliers restent de petits décolletés, aux lacets montants, ou de courtes bottes. Les bouts sont plus arrondis.

Le costume masculin sous le Consulat

Les hommes renoncent également aux excentricités et s’inspirent fortement de l’Angleterre. L’habit dégagé à l’avant s’arrête un peu au-dessus de la taille, se croise sur la poitrine et tombe en deux longs pans à l’arrière. Son col droit monte dans le cou avant de se rabattre, doté de deux larges revers. Les manches sont assez étroites, froncées aux entournures. Elles sont ouvertes à la hauteur de la main, sur laquelle elles descendent.

Une redingote droite et croisée remplace parfois l’habit. Une autre, faite de plusieurs pèlerines superposées, est utilisée comme pardessus. Le gilet, carré à la taille, dépasse légèrement les devants de l’habit.

Le pantalon est collant, s’arrêtant à la cheville, ou très large et descendant jusqu’aux pieds. Dans le premier cas, il laisse voir des escarpins décolletés ou s’engage dans des bottes (« à la hussarde »). On commence à utiliser les bretelles. Avec les bottes, on peut aussi porter une culotte de peau.

En ville, on porte le haut-de-forme à bord assez large. Le « chapeau français » des élégants est un bicorne « en bataille » (à pointes au-dessus des oreilles). Les cheveux, d’abord en « oreilles de chien », deviennent courts à partir de 1800.

Le costume masculin sous l’Empire

De 1804 à 1811, le costume s’ajuste encore. L’habit dégagé est cintré à la taille. Vers 1806, un spencer peut le recouvrir, n’en laissant voir que les basques. Le pantalon est collant, assez court et négligé. La culotte de velours côtelé est également très employée. On porte capotes ou carricks, plus ou moins longs, amples et pourvus d’une ou plusieurs pèlerines. Selon les circonstances, on met des bottes étroites et courtes, ou des escarpins décolletés à boucles. Les haut-de-forme s’évasent d’abord à leur partie supérieure, puis deviennent cylindriques ou tronconiques, avec un bord s’abaissant à l’avant à l’arrière. Les cheveux, souvent bouclés, sont peignés « en coup de vent », d’arrière en avant. Les favoris sont assez courants.

De 1812 à 1819, l’habit garde à peu près la même coupe, mais le col est souvent en velours. Un habit-redingote pourvu d’une jupe à l’arrière, ou une redingote droite, le remplacent parfois. A partir de 1817, les redingotes du matin sont longues et croisées. Celles dites « à l’anglaise » ont un col rabattu et sont fermées bord à bord. Celles « à la polonaise » sont croisées, à col droit et brandebourgs. En ville, l’après-midi, on opte pour le pantalon collant, de tricot, avec de petites guêtres. Mais pour le matin on préfère le pantalon large. Le carrick, à plusieurs collets, tombe jusqu’aux pieds ; ses manches, larges et longues, recouvrent la main. Le haut-de-forme s’allonge. Le bicorne accompagne la tenue habillée dérivant du costume de cour et composée d’un habit à la française, à col très haut, d’un gilet à basque et d’une culotte, le tout en lainage noir ou sombre.

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